MAITRISE DE LA LANGUE FRANÇAISE

Publié le 20/09/2017

Le préfet de région a ainsi demandé au CESER Paca d’établir, un diagnostic des politiques de maîtrise de la langue française et de lutte contre l’illettrisme sur le territoire régional, de pointer les enjeux clés et de faire quelques préconisations visant «à mieux prendre en charge collectivement les publics concernés».

 

Dans son avis, le CESER Paca a dans un premier temps, repréciser quelques chiffres-clés pour la région PACA : 10 % des personnes soit 305 000 personnes (entre 16 et 65 ans) en 2013 rencontraient des difficultés préoccupantes pour lire ou écrire un mot, ou encore pour comprendre un texte simple.
Il a ensuite réalisé un rapide diagnostic des dispositifs et acteurs qui concourent à la maîtrise du français sur le territoire. Le CESER Paca a ainsi fait le constat qu’ils sont nombreux mais complémentaires les uns des autres.

Plusieurs enjeux ont été pointés :

1- La nécessité de différencier les types de publics car ils demandent des accompagnements et des prises en charge spécifiques et adaptées. Entre population primo-arrivante depuis moins de cinq ans ayant signé un contrat d’intégration républicaine et adultes en situation d’illettrisme dont le retour en formation est une démarche difficile qui demande effort et volonté, les besoins et les attentes sont différents. Pour autant, ces publics se retrouvent souvent mixés au sein des formations.

2- La nécessité d’avoir une couverture territoriale complète en matière de formation linguistique et de formation aux compétences de base. Certains territoires ne sont pas ou peu couverts, notamment les territoires ruraux où les populations sont dispersées et très peu mobiles. A contrario certains territoires sont bien couverts mais l'offre existante est saturée.  

3- Le besoin d’une coordination globale des acteurs. Aujourd’hui chaque acteur financeur a ses propres objectifs, attentes et modalités de prescription. Au niveau régional, il n’existe depuis quelques années ni de lieu institutionnel de concertation qui rassemble les décideurs, ni de plan régional qui fixe les grandes lignes de la politique de maîtrise de la langue française, ni de coordinateur régional au niveau de l’Etat. Cette absence d’articulation, d’orientation et de gouvernance communes affaiblit considérablement la dynamique de mobilisation et de partenariat de l'ensemble des acteurs.

4- Enfin dernier enjeu, les difficultés rencontrées par les opérateurs. La richesse de l’offre de formation actuelle est depuis quelque temps menacée par un contexte de plus en plus contraignant et fragilisant pour les organismes de formation : marchés publics concurrentiels, financements en baisse, redéfinition des publics ciblés, remise à plat des ETAPS. Le risque à terme étant de voir disparaître chez les organismes de formation et le tissu associatif toute une offre qualitative et de proximité ainsi qu’une vraie culture du partage et de la solidarité.


LES PROPOSITIONS DU CESER PACA. 
Pour répondre à ces enjeux, le CESER Paca a avancé plusieurs préconisations :

En matière de pilotage, de coordination et d’animation des réseaux

1 - Profiter de la création au niveau national, d’une nouvelle Agence pour regrouper les différentes structures opérant dans ce domaine. L’Agence de la langue française pour la cohésion sociale doit permettre une mutualisation des compétences et des moyens pour une meilleure efficacité et évaluation des politiques existantes. Le CESER souhaite que l’Agence prennent en compte tous les acteurs concernés leurs méthodes de travail, les plus-values et les spécificités et les apports des acteurs de terrain.

2 - Redéfinir une nouveau cadre régional d’intervention partagé qui permette une coordination entre les prescripteurs. Une coordination de l'ensemble des acteurs permettrait de partager des orientations communes, d'articuler les différents dispositifs selon les besoins des individus et d'organiser la complémentarité des offres. Il est important de définir des parcours types d’orientation et de formation pour les bénéficiaires et de mettre en place des suivis de parcours afin d’éviter les publics en errance et l’épuisement des bénéficiaires dans la formation. L’Agence nationale devrait être l'acteur qui assurera cette coordination à l'échelle régionale.

3 - Créer un poste chargé d’une mission d’ensemblier des différents dispositifs et acteurs à l’interface entre ceux qui décident et ceux qui mettent en œuvre. Ce poste devra être dévolu à un représentant de l’Agence ou de l’ANLCI selon l’organisation qui sera retenue par l’Etat en région.

4 - Pérenniser le rôle de capitalisation et d’animation du Centre de ressources sur l’illettrisme en Provence-Alpes-Côte d’Azur.

5 - Relancer la dynamique de construction du Plan d’action régional de prévention et de lutte contre l’illettrisme. Les plans précédents avaient apporté une réelle plus-value aux interventions des acteurs publics et de la société civile sur les champs de la prévention et de la lutte contre l’illettrisme et enclenché une dynamique partenariale.

6 - Conforter la couverture territoriale et un tissu d’acteurs de terrain, notamment bénévoles, détenteurs de compétences et d’expertise dans un contexte concurrentiel fort et de baisse des budgets publics. Il est nécessaire de disposer d’espaces permanents d’apprentissage partout sur le territoire régional.

7 - Généraliser la mise en place de plateformes linguistiques (à l’instar de Marseille et Nice), par territoire de bassin de vie (pour exemple la coordination réalisée par la Maison de l’Emploi sur le bassin d’Istres-Fos) ou au niveau communal. Ces plateformes favorisent l’articulation des différentes offres de formation et l’évolution réelle des publics dans un parcours de formation.

8 - Sensibiliser  les professionnels en charge de l'orientation des publics et du service public de l’emploi, à la détection des difficultés de maîtrise de la langue française.

9 - Evaluer les coûts et l’efficacité des dispositifs au regard d’objectifs qui intègrent toute la diversité des publics.


En matière d’accompagnement différencié des publics

10 - Mettre en place un document de suivi des apprentissages linguistiques qui atteste tout au long de la vie les compétences acquises sur le sujet.

11 - Favoriser une prise en charge individualisée des bénéficiaires.

12 - Maintenir les dispositifs de type «Espaces Territoriaux d’Accès aux Premiers Savoirs (ETAPS)». Les formations dispensées par les ETAPS sont fortement complémentaires de l'offre de l’État. Ce dispositif cible les problématiques de résolution de l’illettrisme en proposant une entrée vers le qualifiant et ce pour tous les publics.

13 - Veiller à ce qu’il n’y ait pas de publics exclus dans l’accompagnement à la maîtrise de la langue française. Les personnes auditionnées ont pointé les difficultés rencontrées par certains publics, comme par exemple les immigrés âgés, dans le cadre de la dématérialisation des services publics et des démarches d'accès aux droits.

14 - Conforter le rôle et les moyens d’actions spécifiques de l’ANLCI, en tant qu’acteur de terrain effectif et reconnu quant à l’accompagnement des publics en situation d'illettrisme.

15 - Mobiliser le monde de l’entreprise et les partenaires sociaux gestionnaires des Organismes Paritaires Collecteurs Agréés (OPCA) afin que soient proposées des formations linguistiques et de remise à niveau à l’égard des salariés. Développer, dans cet esprit,  les accords-cadres entre les OPCA, l’ANLCI, les branches professionnelles et les négociations collectives interprofessionnelles de branche ou d’entreprise. Veiller à ce que les organismes de formation proposent des pédagogies individualisées et différenciées, en lien avec les métiers exercés.
 

CONCLUSION
Maintenir une politique de prévention et de  lutte contre l’illettrisme et l’analphabétisme est essentiel à la cohésion sociale, à l’intégration sociale et au respect des valeurs républicaines. La maîtrise de la langue française permet l’accès à la connaissance, à l’autonomie et à l’émancipation des individus.


Chiffres-clés - sur les 305 000 individus concernés en PACA :
→ 50% occupent un emploi,
→ 52 % ont été scolarisés en France et sont en situation d’illettrisme,
→ 34 % ont fait leur première scolarité à l’étranger,
→ 14 % n’ont jamais été scolarisés et sont analphabètes,
→ 50 % de ces personnes vivent en milieu rural.

 

http://www.ceserpaca.com/avis-La-maitrise-de-la-langue-francaise-17